Une session de formation organisée par le Vatican, qui s’achève ce lundi 19 septembre, a rassemblé plus de 150 nouveaux évêques à Rome. Alors que le « métier » d’évêque est particulièrement exposé, la préparation à ce ministère est paradoxalement assez réduite.
Article paru dans La Croix par Arnaud Bevilacqua Publié le 19/9/2022 à 07h08
« Je ne m’y attendais pas » ; « Je vais me mettre à l’écoute des fidèles pour comprendre les problématiques de mon diocèse »… Ces réactions prudentes reviennent souvent dans la bouche des évêques nouvellement nommés par le pape. Car si la formation pour devenir prêtre est longue et très encadrée, celle préparant à ce « métier » particulièrement exposé, surtout dans le contexte de crise de l’Église, est pour le moins limitée : le nouvel évêque se retrouve rapidement « plongé dans le grand bain », avec une brève préparation.
Comment apprend-on à devenir évêque ? Pour la théorie, cette préparation comprend une formation commune de six jours organisée tous les ans par le Vatican. Synodalité, présentation de la Curie, points plus techniques comme « l’expérience canonique pour l’administration d’un diocèse »… Après une première session tout début septembre – la première en trois ans depuis la pandémie – réunissant plus de 150 nouveaux évêques, une seconde s’achève lundi 19 septembre. Présent à Rome avec d’autres évêques français, Mgr Gérard Le Stang a aussi participé en janvier à une session de trois jours mise sur pied par la Conférence des évêques de France (CEF).
Pour ce qui est de la pratique en revanche, chaque évêque découvre le métier sur le terrain. « Il y a une certaine solitude du ministère d’évêque, ce qui peut surprendre au début », témoigne Mgr Le Stang, Breton de 59 ans nommé « en terre inconnue » à Amiens, en Picardie, en mars 2021.
Un ministère très exigeant
Pour Mgr Emmanuel Gobilliard, évêque auxiliaire de Lyon depuis 2016, sollicité par la CEF pour former ses nouveaux pairs à la communication, il ne fait aucun doute que le ministère d’évêque est rude : on exige de lui « qu’il soit doué en finances, en management, qu’il soit un bon pasteur, en même temps qu’un excellent communicant ! » Or, « ce n’est pas avec l’ordination que l’évêque acquiert toutes les compétences requises », souligne le jeune évêque lyonnais de 54 ans.
D’autant que l’évêque se trouve en première ligne pour la gestion de crise, notamment dans le cas de la révélation d’abus sexuels commis par un de ses prêtres. Des thématiques abordées lors de la formation romaine. En outre, un évêque peut être un théologien reconnu mais ne posséder que de vagues notions d’économie. Or, même conseillé, « c’est lui qui décide, par exemple, si on investit un million d’euros dans tel ou tel projet ; ce qui peut s’avérer un peu vertigineux dans le contexte actuel », témoigne Mgr Le Stang.
S’appuyer sur ses expériences précédentes
Finalement, dans la gouvernance de son diocèse, l’évêque se raccroche à ses responsabilités précédentes. Mgr Gérard Le Stang a notamment été secrétaire général adjoint de la Conférence des évêques de France de 2013 à 2016, des années où il a côtoyé de près l’épiscopat. Mgr Xavier Malle, évêque de Gap et Embrun depuis février 2017, lui, dit tirer un grand profit de son expérience de directeur de cabinet du maire de Cognac (Charente) de 1989 à 1994, avant de devenir prêtre en 2000.
Il sait lire un budget et les questions économiques ou les relations avec les élus ne l’effraient nullement. La gestion des prêtres de son diocèse a en revanche constitué sa plus grande découverte, une mission difficile à appréhender. Mgr Malle a ainsi pris conscience de l’importance de bien s’entourer – « les erreurs que j’ai pu faire, c’est quand j’ai décidé tout seul » – et n’hésite pas à demander conseil aux évêques de sa province, à commencer par l’archevêque de Marseille, un « grand frère ». Mgr Xavier Malle, 57 ans, admet aussi volontiers avoir fait appel, un temps, à un coach professionnel qui accompagne des dirigeants alors qu’il se trouvait « en difficulté ».
Issue de la même génération, Mgr Emmanuel Gobilliard raconte avoir suivi plusieurs formations au management ou à la communication. « Savoir accompagner les personnes, cela s’apprend », explique celui qui est vicaire général modérateur du diocèse de Lyon et à ce titre, « un peu le directeur de presque 900 personnes ».
Toutefois, un évêque ne pourra jamais être paré à tous les imprévus : pandémie, ou plus tragiquement le suicide d’un prêtre… « Ce qui me paraît essentiel, confie l’expérimenté évêque émérite d’Évry, Mgr Michel Dubost, c’est de connaître ses limites et de ne pas se prendre trop au sérieux pour rester soi-même sans être prisonnier de son rôle.»
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« Développer une capacité d’accompagnement »
Olivier, fondateur de Talenthéo, réseau de coachs chrétiens
« Il n’y a pas aujourd’hui de réelle formation humaine et pastorale pour les évêques. À cet effet, j’ai rencontré fin juin le cardinal Marc Ouellet, préfet de la Congrégation pour les évêques, pour réfléchir à ce sujet. Le rôle d’évêque est particulier et a besoin d’être accompagné, même avec une expérience de curé ou de vicaire général pour certains. Se former pour renforcer ses compétences relationnelles et de gouvernement me paraît indispensable. On ne leur demande pas d’être experts sur tous les sujets mais de développer une capacité d’accompagnement et de discernement. Avec Talenthéo, nous avons accompagné une trentaine d’évêques jusqu’ici. »
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